Le prolétariat de la Renaissance. Les révélations d’un village de mineurs. La Fouchelle, Val d’Argent, Alsace
Pierre FLUCK, Delphine BAUER, J.-François BOUVIER. Préface de Marc GRODWOHL. Editions du Patrimoine minier, 2020, 250 illustrations, 227 p.
C’est avec enthousiasme que je recommande l’achat (et la lecture !) de cet ouvrage. Mes propres études ont, je l’espère, contribué à documenter assez abondamment l’habitat rural en Alsace du milieu du XVe s. au début du XVIIe s. La connaissance de l’habitat urbain de la même période a fait elle aussi de grands progrès avec les recherches de Maurice Seiller, Maxime Werlé principalement.
Avec le présent ouvrage, on change de registre en découvrant l’habitat d’un autre groupe social, celui des colonies de mineurs du début du XVIe s. au début du siècle suivant, au-dessus de Sainte-Marie-aux-Mines (Haut-Rhin). Pour la première fois, on dispose d’un corpus de 21 maisons ouvrières datées, contemporaines, dont la fouille rigoureuse permet d’analyser à la fois les caractères communs, les variantes et le mode de groupement tout en apportant de précieuses informations sur le mode et le niveau de vie. La documentation publiée permet aisément la comparaison avec d’autres genres d’habitat de la même période. Elle est donc essentielle à la compréhension et à définition de l’objet dit d’« architecture vernaculaire ».
En voici la présentation par l’éditeur, figurant sur le verso de couverture.
« Sept années de fouilles à la Fouchelle ont ressuscité un village perdu. Les vingt et une maisons fouillées regorgent de trésors. Cellules d’habitation de vingt à vingt-cinq mètres-carrés organisées en bandes, elles se sont toutes révélées parées d’un poêle en terre cuite aux atours somptueux, dont les carreaux composent un morceau d’histoire de l’art unique dans le Grand-Est. Mais qui donc étaient les hôtes de ces lieux ?
Les fouilles ont livré des minerais, des résidus de fonderies, des ustensiles d’essayeurs : voilà un village de mineurs et de fondeurs. Des mines et des fonderies voisines émerge la sulfureuse mine d’argent Saint-Barthélemy qui défraya la chronique de 1524 à 1538. Mais il y a mieux. Par leur répétitivité, leur normalisation, leur organisation, la planification de leur schéma urbanistique, ces maisons offrent toutes les caractéristiques d’une cité ouvrière. Deux cent cinquante ans avant l’affirmation de ce type d’habitat dans la logique de la révolution industrielle en Angleterre. Une cité voulue par les sociétés minières pour héberger les familles de mineurs et de fondeurs issus de la Mitteleuropa dans la mouvance de cette « ruée vers l’argent » de la Renaissance.
Cet ouvrage fait le récit de la découverte inédite d'une cité ouvrière d'avant-garde et invite à s’interroger sur l’impermanence des réalisations humaines. La nature s’est ré-emparée de ces lieux, fossilisant à tout jamais l’empreinte de l’homme. Celle-ci par là même vient se positionner dans la succession des temps géologiques, donnant au concept d’Anthropocène toute sa résonnance ».
Prix 15 € + port 6 €
Aux Editions du patrimoine minier
29 rue Jean Jaurès
68360 Soultz
editions.patrimoine.minier@gmail.com
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J'ai eu le privilège de visiter le chantier un pluvieux jour de l'été 2017, j'en ai rapporté quelques photos, bien entendu l'illustration de l'ouvrage est d'un tout autre niveau :
Des découvertes partagées avec générosité
Une rareté : un poêle Renaissance quasi complet, effondré sur place
Des maisons en bande, dont la façade arrière est encastrée dans la pente du terrain naturel. On reconnaît ici la partition entre l'entrée/cuisine à gauche et la Stube à droite. Il susbsiste du poêle un pavement de soubassement en careaux de terre cuite, dans l'angle.
La façade avant, sur rue, a été rognée par la création d'un chemin plus large
Le modèle se répète dans une autre maison, ici on note en bas à gauche une subdivision Stube/Kammer